CCPR/C/130/D/2580/2015 procès-verbal d’inhumation, et la Direction de l’organisation et de l’administration a autorisé le transport de la dépouille de l’hôpital jusqu’au lieu d’enterrement 4. 2.7 Le 5 septembre 2000, en l’absence d’enquête adéquate et diligente sur les circonstances et les causes du décès de son fils, l’auteur a écrit au Ministre de la justice pour solliciter son intervention auprès des autorités compétentes, afin d’engager des investigations et d’identifier et de poursuivre les personnes responsables. Cette démarche est elle aussi restée vaine. Le 5 mai 2006, à la suite d’une requête déposée par l’auteur demandant que lumière soit faite sur le décès de son fils, un officier du groupement de la gendarmerie nationale d’El Aouana − l’unité même qui a procédé à l’exécution sommaire au cours de laquelle Fateh Dafar a été tué − a délivré un « procès-verbal de constat de disparition dans les circonstances découlant de la tragédie nationale »5. L’auteur considère qu’un tel document constitue un faux en écriture publique, crime passible de réclusion perpétuelle au titre de l’article 215 du Code pénal. Le 13 janvier 2007, sur insistance de l’auteur, le même officier a délivré un certificat de décès au nom de son fils, sans pour autant indiquer les causes et les circonstances du décès6. 2.8 Malgré tous les efforts de l’auteur, aucune enquête n’a été menée et les responsables de l’exécution de son fils n’ont pas été inquiétés7. L’auteur souligne qu’il lui est aujourd’hui impossible légalement de recourir à une instance judiciaire, après la promulgation de l’ordonnance n o 06-01 du 27 février 2006 portant mise en œuvre de la Charte pour la paix et la réconciliation nationale. Les recours internes, qui ont été inutiles et inefficaces, sont donc en plus devenus totalement indisponibles. La Charte pour la paix et la réconciliation nationale dispose que « nul, en Algérie ou à l’étranger, n’est habilité à utiliser ou à instrumentaliser les blessures de la tragédie nationale pour porter atteinte aux institutions de la République algérienne démocratique et populaire, fragiliser l’État, nuire à l’honorabilité de tous ses agents qui l’ont dignement servie, ou ternir l’image de l’Algérie sur le plan international » et rejette « toute allégation visant à faire endosser par l’État la responsabilité d’un phénomène délibéré de disparition ». La Charte indique en outre que « les actes répréhensibles d’agents de l’État, qui ont été sanctionnés par la justice chaque fois qu’ils ont été établis, ne sauraient servir de prétexte pour jeter le discrédit sur l’ensemble des forces de l’ordre qui ont accompli leur devoir, avec l’appui des citoyens et au service de la Patrie ». 2.9 Selon l’auteur, l’ordonnance n o 06-01 interdit sous peine de poursuites pénales le recours à la justice, ce qui dispense les victimes de la nécessité d’épuiser les voies de recours internes. Cette ordonnance interdit en effet toute plainte pour disparition ou autre crime, son article 45 disposant qu’« [a]ucune poursuite ne peut être engagée, à titre individuel ou collectif, à l’encontre des éléments des forces de défense et de sécurité de la République, toutes composantes confondues, pour des actions menées en vue de la protection des personnes et des biens, de la sauvegarde de la Nation et de la préservation des institutions de la République algérienne démocratique et populaire ». En vertu de cette disposition, toute dénonciation ou plainte doit être déclarée irrecevable par l’autorité judiciaire compétente. De plus, l’article 46 de la même ordonnance prévoit ce qui suit : « Est puni d’un emprisonnement de trois (3) ans à cinq (5) ans et d’une amende de 250 000 à 500 000 [dinars algériens], quiconque qui, par ses déclarations, écrits ou tout autre acte, utilise ou instrumentalise les blessures de la tragédie nationale pour porter atteinte aux institutions de la République algérienne démocratique et populaire, fragiliser l’État, nuire à l’honorabilité de ses agents qui l’ont dignement servie, ou ternir l’image de l’Algérie sur le plan international. Les poursuites pénales sont engagées d’office par le ministère public. En cas de récidive, la peine prévue au présent article est portée au double. ». 4 5 6 7 Documents joints au dossier. Pièce jointe au dossier. Le certificat mentionne qu’en 1994, Fateh Dafar a été arrêté par deux individus prétendant appartenir aux services de sécurité et que, trois jours après, il a été retrouvé tué sur la plage de Mrigha d’El Aouana. L’auteur mentionne que selon l’article 63 du Code de procédure pénale, « [l]orsqu’ils ont connaissance d’une infraction, les officiers de police judiciaire […], soit sur les instructions du Procureur de la République, soit d’office, procèdent à des enquêtes préliminaires ». 3

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