6 février 2020
JOURNAL OFFICIEL DE LA RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
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scanners…) connectés à internet doivent être mis à disposition des personnes retenues en vue de faciliter
l’exercice de leurs droits (contact avec les avocats, accès à l’information juridique), leurs démarches
administratives et personnelles (virements bancaires, résiliation de contrats, transmission de documents), de
maintenir leurs liens avec leurs proches, de leur permettre de s’informer utilement ou encore de lutter
contre l’ennui et l’oisiveté forcée.
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Dans les établissements de santé accueillant des patients hospitalisés sans leur consentement, les pratiques sont
très diverses. Certains disposent de salles équipées d’ordinateurs connectés à internet ou de tablettes numériques
mises à disposition des patients, d’autres installent un réseau wifi librement accessible dans l’enceinte de l’hôpital,
d’autres encore proposent un accès à des ordinateurs connectés dans le seul cadre d’activités ou de manière
ponctuelle pour répondre à des besoins identifiés, d’autres enfin prohibent tout accès à des équipements
informatiques, qu’ils soient personnels ou collectifs, connectés ou non à internet.
Le droit d’accès à internet ne figure pas expressément parmi les droits intangibles du patient identifiés par
l’article L. 3211-3 du code de la santé publique (CSP). Il s’ensuit que les restrictions dont il peut faire l’objet
doivent répondre aux exigences posées au premier alinéa de cet article, et être « adaptées, nécessaires et
proportionnées à son état mental et à la mise en œuvre du traitement requis ». Il résulte de cette disposition que
l’accès à internet d’un patient admis en soins psychiatriques sans son consentement ne saurait être restreint qu’en
vertu d’une prescription médicale individualisée, motivée, circonstanciée et réévaluée au regard de l’évolution
clinique de l’intéressé.
Aussi, le CGLPL recommande qu’un accès à internet soit aménagé dans l’ensemble des centres
hospitaliers accueillant des patients admis en soins psychiatriques sans leur consentement, afin de permettre
aux patients dont l’état clinique le permet de consulter leur messagerie, de se former ou de s’informer et
d’initier des démarches pour préparer leur levée d’hospitalisation, en toute autonomie. De même, les
patients doivent pouvoir conserver leurs terminaux mobiles personnels (smartphones, ordinateurs
portables, tablettes, etc.). Les seules exceptions doivent relever d’une décision médicale ou du choix du
patient concerné. Toutes les chambres doivent être équipées de casiers fermant à clé afin que les patients
puissent assurer, de manière autonome, la protection de leurs biens. La présence de professionnels aux côtés
des patients lorsqu’ils utilisent leur messagerie électronique, consultent des sites internet ou effectuent des
démarches en ligne ne peut être justifiée que par la demande expresse formulée par le patient lui-même ou
par un motif thérapeutique. Les établissements de santé doivent par ailleurs aménager un accès wifi pour
permettre aux patients d’utiliser leurs terminaux personnels.
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En France (12), l’interdiction absolue faite aux personnes détenues d’accéder à internet ne repose sur aucune
disposition légale. Une note du 21 mai 2004 intitulée Interdiction faite aux détenus d’accéder à internet et à tout
[système d’information (SI)] extérieur a réglementé cet accès, et ce principe a été de nouveau posé par la circulaire
de l’administration pénitentiaire du 13 octobre 2009 (13) relative à l’accès à l’informatique pour les personnes
placées sous main de justice, puis par le décret du 23 décembre 2010 (14) relatif à l’accès aux publications écrites
et audiovisuelles, aux termes duquel les personnes détenues peuvent y accéder « par l’utilisation collective ou
individuelle d’équipements informatiques non connectés à des réseaux extérieurs ». Le décret du 30 avril 2013
relatif aux règlements intérieurs types des établissements pénitentiaires abroge et remplace le décret précité sans
modifier cette disposition désormais codifiée en annexe de l’article R.57-6-18 du code de procédure pénale.
Toutefois, la circulaire « informatique » du 13 octobre 2009 aménage cette interdiction en rappelant qu’« hormis
pour les salles dédiées, notamment les espaces Cyber Base, les connexions à des réseaux externes depuis les salles
d’activité sont interdites. Les règles de sécurité suivantes concernent donc les salles d’activités connectées à des
réseaux externes ayant reçu une validation de l’état-major de sécurité et du [responsable de la sécurité des systèmes
d’information (RSSI)] ». Expérimentées au titre d’une convention signée en 2007 entre le ministère de la justice et
la Caisse des dépôts et consignations, les Cyber-bases justice sont des espaces informatiques équipés en réseaux
avec un accès limité et contrôlé à internet, dénués néanmoins de possibilité d’interaction directe avec l’extérieur.
Sept établissements pénitentiaires (15) ont été désignés pour développer l’expérimentation qui a débuté en 2009.
Dix ans après, certaines de ces Cyber-bases ont cessé de fonctionner, notamment en raison d’une maintenance
insuffisante ou inadaptée (16). Cet outil, qui avait vocation à « rendre les personnes détenues autonomes dans
l’utilisation de l’outil internet et multimédia et de leur permettre d’accéder aux équipements informatiques, au
travers d’ateliers collectifs, d’accompagnement individuel ou d’accès encadré » (17), n’a par ailleurs jamais été
déployé dans d’autres établissements.
Un nouveau projet, appelé Numérique en détention (NED), est actuellement expérimenté par l’administration
pénitentiaire et vise à « dématérialiser certains processus de gestion internes » (18). Ce portail, accessible en
cellule, dans des salles d’activité ou dans les coursives, devrait permettre aux personnes incarcérées de procéder à
des commandes en cantine (achat de nourriture et de biens d’usage courant), de consulter le solde de leur compte
nominatif, de formuler des requêtes auprès des différents services de l’établissement ou encore d’avoir accès à un
environnement numérique de travail cependant limité à quelques enseignements et formations et sans accès à
internet.