Version provisoire non-éditée CAT/C/55/D/575/2013
Rappel des faits présentés par le requérant
2.1
Jusqu’aux faits relatés dans la présente communication, le requérant exerçait la
profession de militaire au camp Ngagara, à Bujumbura (police militaire) et avait le grade de
capitaine. Il est marié et a deux enfants.
2.2
Selon le requérant, son arrestation s’est inscrite dans un contexte général de
violations des droits de l’homme au Burundi dans lequel aucune réelle volonté de
promouvoir la justice et de mettre fin à l’impunité ne s’est manifestée. Le 29 janvier 2010,
le requérant s’est rendu comme à son habitude sur une des plages de Bujumbura pour y
retrouver des amis. Ses amis et lui-même ont soudain entendu des cris et des coups de feu.
Plus de cinquante hommes armés ont surgi en tirant dans leur direction, leur hurlant de ne
pas bouger et de rester à terre. Le requérant a pu reconnaître parmi certains des hommes des
agents du Service national des renseignements (SNR) ainsi que le chef d’Etat-major de
l’armée nationale du Burundi. Quelques minutes plus tard, un autre groupe d’à peu près 60
hommes, habillés en uniformes militaires, portant des bérets rouges et munis de
mitrailleuses, de kalachnikov et de lance-roquettes, se sont approchés. Ils tiraient dans tous
les sens. Ces agents ont demandé à tous les militaires présents sur la plage de s’allonger au
sol. Ces derniers se sont exécutés. Le requérant a été maîtrisé par des agents du SNR ainsi
que par le Commandant de la 1ère Région militaire et ses sept gardes du corps. Le
requérant était accusé d’être le commanditaire d’un coup d’Etat.
2.3
Alors qu’il était complètement maîtrisé, à terre, les bras attachés dans le dos, le
requérant a été frappé par trois des agents de l’Etat, sur les ordres du Commandant. Ils lui
ont administré des coups de pieds à la tête ainsi que des coups de crosses de fusil dans le
dos et sur les jambes. Entre le moment où il a été maîtrisé et l’arrêt des coups, environ 30
minutes se sont écoulées. Il a ensuite été embarqué dans un camion militaire avec les autres
militaires interpellés. Ils ont atteint la Première Région militaire située aux abords du Camp
de Défense Contre Avion (DCA) vers 20h45.
2.4
Quelques minutes avant que les militaires soient placés dans le camion, une
journaliste de la Radio Publique Africaine (RPA), est arrivée sur les lieux après avoir été
informée de ce qui se passait sur la plage. Son témoignage, notamment le fait que le
requérant et d’autres militaires ont été frappés et maltraités avant d’être emmenés, confirme
les dires du requérant2.
2.5
A son arrivée à la Première Région militaire, le Ministre de la défense, présent sur
les lieux, a ordonné que les militaires interpellés soient menottés et emmenés dans une
première salle où ils sont restés environ une heure sans soin. Le requérant a ensuite été
emmené dans une salle où étaient présents trois officiers de la police judiciaire, lesquels ont
mené un premier interrogatoire. Le requérant a ensuite subi un autre interrogatoire, cette
fois dans le bureau du Commandant de la 1ère Région militaire, en présence du Directeur
de la police nationale. Niant toutes les accusations, le requérant a été frappé violemment
avec une chaise au niveau du dos par le Directeur de la police. Il a été déshabillé de force et
a dû se mettre à genoux sur des capsules de bière. Il est resté dans cette douloureuse
position pendant toute la durée de l’interrogatoire, soit plus de trois heures, tout en recevant
des coups sur tout le corps. Il a notamment reçu des coups de ceinture au niveau de la tête
et sur les jambes. Durant toute la durée de ce violent interrogatoire, il était menotté les bras
dans le dos. Il a par ailleurs fait l’objet d’un simulacre d’exécution. Le Directeur de la
police nationale a en effet pointé son pistolet sur son visage. Tout en le chargeant, il a
demandé au requérant de répondre par l’affirmative à toutes les accusations qui étaient
formulées contre lui et d’avouer les faits.
2
Ce témoignage est annexé à la communication.
3